Biographie :
Deicide est le quatrième groupe fondateur de la scène death metal américaine (aux côtés de Death, Morbid Angel et Obituary). Le groupe se démarque de ses pairs par son image, bien plus violente : on traite ici de satanisme pur, d'annihilation des chrétiens, et d'autres sujets tout aussi pacifiques... La musique du groupe est elle aussi bien différente, extrêmement malsaine (notamment grâce aux voix démoniaques du leader Glen Benton, doublées black/death en studio, et trafiquées à la manière des voix des démons dans les films Evil Dead, on note d'ailleurs une référence à ce film dans la chanson Dead by dawn).
Le premier album éponyme de Deicide est un brûlot de haine et de brutalité, alliées à la technicité de ses membres. Le groupe a par le passé fait plus parler de lui par ses démélés avec d'autres groupes ou avec des sociétés protectrices des animaux (Deicide ayant pris l'habitude de jeter des morceaux d'animaux morts sur son public), ainsi que par les agissements de son chanteur Glen Benton (une croix inversée scarifiée sur le front, etc...).
En 2004, les frères Hoffman, guitaristes, quittent le groupe. Les raisons évoquées varient, et ce serait apparemment dû au comportement de Glen Benton qui selon les déclarations des deux frères "n'est pas un vrai sataniste, il ne croit pas en ses paroles et s'est même marié dans une église". Ils seront remplacés par Jack Owen (ex-Cannibal Corpse) et Dave Suzuki (Vital Remains). Glen Benton et les frères Hoffman sont actuellement en conflit sur le plan juridique, chacun voulant récupérer les droits sur le nom de groupe... Cela n'empêche pas Deicide de faire son bout de chemin et d'enregistrer un nouvel album. Dave Suzuki reprenant son poste dans Vital Remains, c'est donc Ralph Santolla (ex-Death et Iced Earth) qui tiendra la six-cordes dans le groupe... Ainsi formé, le groupe enregistre son nouvel album The Stench Of Redemption, un tournant dans la carrière du groupe...
Deicide, en voilà un groupe qui fait couler de l'encre depuis sa création. Tout d'abord adulé par les fans de death old school, décrié par les biens-pensants du fait de leur image satanico-provocatrice, puis délaissé par les fans de death metal pour cause d'albums de plus en plus mauvais... Deicide a toujours fait parler de lui (certes pas toujours pour ses qualités musicales), et The Stench Of Redemption n'a pas échappé à la règle. Après un Scars Of The Crucifix déroutant mais qui marquait néanmoins un retour sérieux à la composition, et surtout après le départ des deux guitaristes du combo, Deicide faisait plus que jamais parler de lui. Bon nombre de questions étaient soulevées : qu'allait donner ce nouvel album ? Et Ralph Santolla qui disait avoir composé les meilleurs solos de sa carrière... Aïe, en général quand un groupe dit ça, il se trompe pas mal... Un buzz fabuleux commençait à monter. Puis vint le fameux 6/6/6, où Deicide a lâché deux titres du prochain album. Déjà : une claque. Puis cet album...
L'EP 666 nous avait déjà prévenu. Ce n'est plus le Deicide d'autrefois qui nous assène ici un coup de crucifix en pleine gueule. Ici, nous n'avons plus affaire au Deicide evil, sombre et malsain d'autrefois. The Stench Of Redemption nous propose un Deicide nouveau, surpuissant, ravageur et... transformé. Car oui, cela peut sembler à la fois étonnant et blasphématoire de la part d'un groupe de la trempe de Deicide, mais le groupe a totalement transformé sa musique, son son, son ambiance, avec l'arrivée des deux nouveaux guitaristes. Oui, Deicide évolue, et franchement, il ne leur est jamais rien arrivé de mieux. The Stench Of Redemption diffère énormément de ses prédécesseurs : premier changement, le tempo. La vitesse du groupe est étonnante, Steve Asheim se révèle furieusement véloce derrière ses fûts, et n'a jamais blasté aussi vite (mais ça, Scars Of The Crucifix l'annonçait déjà). Les compos se trouvent ainsi dotées d'une puissance façon pétage à la gueule encore jamais vue dans le combo, certes aidée par la production, mais qui diffère énormément de la débauche de brutalité actuelle grâce à ces fabuleuses guitares sur lesquelles je reviendrai. Malgré cette vitesse étonnante, les morceaux savent ralentir le temps de mid tempos meurtriers (Desecration, tiens tiens le morceau hommage aux français...) ou d'intros à l'ambiance très Seasons In The Abyss, mélodiques et malsaines (The Lord's Sedition), ou encore prendre de savantes doses de thrash metal brise-nuque. On est loin du marteau-pilon auquel Deicide nous avait habitués... Mais le véritable point fort du disque se situe dans la paire de six-cordes dont s'est doté le combo.
Les deux guitaristes se sont en effet surpassés sur ce disque, concoctant d'impressionnants riffs jamais entendus dans l'histoire de Deicide. Dès le titre éponyme en ouverture de l'album, on est plongé dans le bain de sang : les riffs sont clairs, techniques, puissants, et ont surtout un redoutable feeling mélodique presque néo-classique (témoin le riff principal de ce fameux morceau titre), donnant une ambiance comparable à un Dissection ultra bourrin, des mélodies très efficaces, mémorisables et toujours puissantes. Les riffs sont accrocheurs, dans une pure tradition death metal old school, basés sur beaucoup de riff en trem-pick (les fameux riffs tronçonneuses), quelques rythmiques presques thrash (Hommage For Satan), et des riffs tirant parfois vers le grind (Death to Jesus). Les cordes se permettent également quelques envolées en son clair (!) sur par exemple Lord's Sedition (un des meilleurs morceaux du disque), des passages atmosphériques précédant les solos, apportant une dimension ambiante à Deicide pour mieux péter sévère à la tronche façon C4 dans une débauche de riffs bourrins, avec un côté maléfique moins prononcé mais toujours un peu présent. Le mal laisse ici sa place à une tonalité presque épique, notamment dans Crucified for the Innocence ou Never To Be Seen Again, l'apothéose étant souvent atteinte dans les riffs qui accompagnent les soli (Hommage for Satan). Et parlons-en des soli ! Ralph Santolla a tenu ses promesses !! Les solos ici sont magnifiques, tantôt mélodiques et épiques (Hommage for Satan, Desecration), tantôt énervés et chaotiques (The Stench of Redemption), les soli de la paire de guitaristes (oui oui, même Jack Owen a fait de bons solos ! Il surpasse tout son travail avec Cannibal Corpse rien que dans ce disque...), et toujours dotés d'une technique à toute épreuve, les écarts solistiques des deux gratteux feront date dans le death metal. On avait pas vu de tels soli, si accrocheurs et mélodiques depuis le Individual Thougt Patterns de Death... Si si, on parle toujours d'un album de Deicide là. Une leçon à prendre pour beaucoup de groupes actuels... J'en vois déjà certains venir : non, bien que Deicide ait tourné à la fois plus brutal et plus mélodique, il n'est en rien un clone de Vital Remains, et suit sa propre route. Concernant la voix, Glen Benton est toujours impérial derrière son micro, mais se fait ici plus guttural, usant toujours des voix doublées adorées des fans, et ajoutant un peu de sardonique à ce Deicide cru 2006 , sans pour autant renouer avec l'ambiance de l'éponyme ou de Liers In Wait (jetez une oreille à ce groupe, fans de death metal evil...).
he Stench Of Redemption est ni plus ni moins qu'une des tueries death metal de 2006. Le groupe s'est assagi pour mieux se réveiller, toujours plus brutal mais pourtant plus mélodique, dotés de soli magnifiques. Deicide s'assagit, délaissant son image evil pour devenir un vrai, un pur groupe de death metal qui déchire. Des musiciens ni plus ni moins (Benton est de moins en moins crédible dans ses trips satanistes, vraiment là pour combler le vide des paroles comme en témoigne le clip d'Hommage for Satan qui rappelle plus le death metal classique et l'attitude scénique de la bande...) faisant de la musique puissante, mélodique et de qualité. Deicide n'est plus le Mal : il est la Puissance, incarnée dans du death metal moderne, efficace, à la fois brut de décoffrage et très travaillé.
Discographie:
Deicide (1990)
Legion (1992)
Once Upon the Cross (1995)
Serpents of the Light (1997)
When Satan Lives (live 1998)
Insineratehymn (2000)
In Torment in Hell (2001)
The Best of Deicide (2003)
Scars of the Crucifix (2004)
The Stench of Redemption (EP 2006)
The Stench of Redemption (2006)